S.V.P. GANDOLFO

La relation aux environnements est un paramètre inaliénable de toute activité du vivant.
La proximité, la distance, comme la perspective de contextes géographiques ou économiques modifiant nos existences sont les ressorts de ces activités.
Si mon travail a pendant longtemps, pris la forme de l'installation, afin notamment d'inclure physiquement le spectateur comme acteur des œuvres produites, une cassure abrupte a fait jour et a mué, dans un premier temps, cette pratique multiple, construite de pièces quotidiennes liées à l'actualité, en une pièce unique adaptable à son espace de réception. Une écharpe tricotée manuellement par mes soins au point mousse, faite de laines récupérées devint l'objet évocateur de figures mythologiques et de la vacuité de la prétention pérenne.
Parallèlement à cet engagement, naissaient les premières images issues de l'onde présente sur le tricot (le point mousse). L'onde devint une récurrence dans nombre de projets d'actions, de vidéos, de dessins, de photographies, avec pour leitmotiv, la nécessité de la disparition formelle. Ce qui se produit après dix années d'exercice par la destruction d'une grande partie des pièces réalisées et des projets ébauchés. L'immatérialité suggérée pointait le bout de son nez. L'image numérique lui permit une manifestation dans le corpus du travail.
La durée d'existence et de visibilité d'une image numérique est relative. Elle est plus aisément envisagée comme œuvre, ou produit, si son transfert sur un support tangible est effectué, renouvelant et alimentant ainsi, le conformisme daté d'une création n'ayant d'existence réelle que palpable. Mais ceci n'est évidemment qu'affaire de choix, de positionnement idéologique ou économique. Comme le sont les données chiffrées qui jalonnent nos vies, qui intiment ce que nous pensons être nos décisions. Dans ce registre des données chiffrées, les statistiques, les moyennes, les sondages sont utilisés comme le sont les rennes d'un attelage. À tel point qu'un comportement de groupe est synthétisé aujourd'hui par une moyenne, ce qui fait de la moyenne en question, une image d'un comportement, perversion aboutie, et sans doute durable d'une société, qui fut à l'aube de sa pensée, démocratique, mais qui grâce à cette communication établie sur le nombre, prends les atours d'une pensée contrainte.
Depuis quelques années, les images que je produis sont des tentatives de concentrés d'images existantes, comme les opinions peuvent paraître à certains endroits, des propositions de condensés de pensée. Une des questions présentes à l'origine du procédé de constitution de ces images et lors de leur fabrication, est : « la moyenne de la chose fait-elle une chose nouvelle ? » Comme le tricot utilisait le rebut de fabrication, mes images ont tout d'abord utilisé pour exister, les images des autres, évoquant non sans ironie, l'impératif du recyclage.
La récolte de groupes de cent ou de cinquante photographies sur internet, leur traitement, par un système de glacis, pour en arriver à une image unique, faite de transparences et d'opacités constituent l'essentiel des gestes plastiques. Les objets et sujets choisis relèvent tant d'un arbitraire affirmé qu'ils peuvent se situer formellement près d'une figuration visible, interprétable, aux confins d'une abstraction colorée, socle déjà usité de parti-pris esthétiques, ou sur le pourtour d'un égotisme sans cesse combattu. Le fait est que, la base est toujours le réel et ses représentations.
Depuis peu, l'appareil photo est venu se substituer à la collection d'image. Quelques superpositions (puisque c'est de cela dont il s'agit) sont faites à partir de séries de cinquante ou cent prises de vues d'une même zone ou sujet, modifiant de ce fait terriblement, la nature formelle du travail, de l’œuvre et sans doute du sens.
S.V.P.G. 2018